ECONOMIE – TURQUIE

La répartition des activités économiques comme les niveaux de vie opposent vigoureusement les deux moitiés du pays, que l’on pourrait délimiter par une diagonale Zonguldak-Gaziantep: l’Ouest industrialisé et urbanisé, avec des taux d’alphabétisation et de fécondité proches du niveau européen; l’Est rural, sous-industrialisé et pauvre, surtout au sud (zone de peuplement kurde).

Agriculture

La Turquie est d’abord une nation de paysans, classe sociale qui représentait 46,6 % de la population active. La modernisation de l’agriculture, engagée dans les années 1950 avec les débuts de la mécanisation en Thrace, en Anatolie centrale et dans la Cilicie, s’est traduite par le recul de la jachère et l’accentuation des spécialisations régionales. Elle reste entravée par l’exiguïté des exploitations (leur dimension moyenne ne dépassait pas 6,2 ha en 1980). Le «fonds commun» présent dans toutes les régions associe la culture pluviale des céréales et l’élevage de gros et de petit bétail (bovins, ovins, caprins). Pour une fraction non négligeable, l’élevage est toujours pratiqué par des groupes nomades (Turkmènes du Taurus occidental, Kurdes du Taurus oriental); ceux-ci hivernent dans les basses pentes ou les piémonts boisés et estivent sur les alpages d’altitude. Dès le milieu du XIXe siècle, les régions maritimes ont ajouté à ce fonds commun des cultures commerciales spécialisées: oliviers, figuiers, vignes (qui donnent notamment les raisins secs de Smyrne), plus tard coton, agrumes et cultures maraîchères sous serre le long de la frange méditerranéenne. Le tabac pousse dans les régions de l’Égée, de Marmara et dans les plaines deltaïques de la mer Noire. Quant aux noisetiers et aux théiers, ils sont cultivés le long du littoral pontique oriental. Les cultures commerciales sont davantage localisées dans l’intérieur: pavot autour d’Afyon (ville dont le nom signifie «opium»), roses à confiture dans le bassin d’Isparta, abricots de Malatya, betteraves à sucre dans les plaines d’altitude moyenne. Un projet hydraulique concernant l’Anatolie du Sud-Est doit permettre de développer de manière considérable la culture du coton sur les plateaux du Sud-Est.

Ressources minérales 

La Turquie est faiblement dotée en combustibles minéraux. La production charbonnière du bassin houiller de Zonguldak-Eregli, le long de la mer Noire, plafonne autour de 5 millions de tonnes; elle est complétée par d’abondants gisements de lignite à faible pouvoir calorifique (45 millions de tonnes), destiné aux centrales thermiques. Pauvre en hydrocarbures, la Turquie, dont la production ne couvre qu’une infime partie de ses besoins (le gisement de Batman, dans le Sud-Est, ne fournit que 4,2 millions de tonnes), s’est dotée d’une capacité de raffinage de 35 millions de tonnes pour traiter le pétrole importé du Moyen-Orient. L’effort déjà ancien de mobilisation d’un important potentiel hydroélectrique, actuellement poursuivi avec le gigantesque projet d’aménagement des bassins de l’Euphrate et du Tigre, fait du pays le premier producteur d’électricité hydraulique du Moyen-Orient. Parmi les minerais métalliques, les seuls à présenter quelque importance économique sont le fer de Divriggi (Anatolie orientale) et de la région d’Izmir, la bauxite, l’antimoine et, surtout, le chrome du Taurus occidental et de la région de Van.

Industrie

Après les premières créations remontant à l’époque ottomane – industries légères (textile et agroalimentaire) dans les grandes villes occidentales –, le début de la période républicaine a vu un effort de redistribution de l’industrie à travers tout le territoire, soutenu par un secteur public important. Mais les résultats restent très imparfaits, surtout depuis que la politique de privatisations, engagée au cours des années 1980, a redonné le premier rôle au secteur privé: l’industrie, qui n’occupe encore que 20 % de la population active, reste concentrée dans les grandes agglomérations urbaines. Istanbul réunit à elle seule le quart des emplois industriels du pays. Le textile reste l’une des principales branches industrielles: filature et tissage du coton dans les villes de la Cilicie et de l’Égée, de la laine et de la soie à Bursa, du mohair (poil des chèvres Angora) à Ankara. Il faut y ajouter la confection à Istanbul et un artisanat du tapis toujours bien vivant. Des industries de base ont été développées: sidérurgie (Karabük, Iskenderun, Ereggli), chimie lourde, raffineries de pétrole, fabrication d’engrais et de matières plastiques.

Le tertiaire Développé plus vite que l’industrie, grâce à l’amélioration des communications et au renforcement de l’appareil administratif, le secteur tertiaire a suivi les progrès de l’urbanisation: le taux de population urbaine (25 % en 1950) avoisine désormais 60 %. Deux agglomérations se partagent les fonctions de commandement: la nouvelle capitale (Ankara) et l’ancienne (Istanbul).

Emigration et tourisme L’ouverture sur l’extérieur, dans les deux sens, est venue compléter les ressources endogènes. Depuis les années 1960, la Turquie a alimenté une forte émigration de main-d’œuvre vers l’Europe occidentale, principalement l’Allemagne, puis vers les pays pétroliers du Golfe. Cette diaspora, forte de près de 3 millions de personnes, apporte au pays des sommes d’argent non négligeables et un savoir-faire. Toutefois, elle tend à prendre de plus en plus d’autonomie par rapport à la mère patrie.

La Turquie dispose d’un fort potentiel touristique grâce à un climat agréable, à des sites naturels attractifs et à un patrimoine historique et archéologique unique et varié, symbolisé par Istanbul. Le tourisme s’est vigoureusement développé depuis les années 1960, à mesure de la saturation des pays méditerranéens situés plus à l’ouest. Les grandes régions touristiques sont celle d’Istanbul, la Cappadoce, les côtes de la mer Égée et de la Méditerranée. Le nombre de visiteurs – essentiellement allemands, britanniques, français et américains – a culminé en 1989 à 4,5 millions avant de connaître un léger recul consécutif à la guerre du Golfe et aux troubles politiques.