HISTOIRE – SLOVAQUIE

Les premiers Slaves slovaques, succédant aux Germains, s’établissent sur l’actuel territoire slovaque au VIe siècle. Unis aux Tchèques dans l’État de Grande-Moravie au IXe siècle et christianisés par les missions franques encouragées par l’évêché de Salzbourg et de Passau, puis celles du grec Méthode, les Slovaques doivent subir au XIe siècle l’invasion des Magyars (Hongrois). Sous le règne du roi hongrois Matias Corvin (1458-1490), la Slovaquie entra en contact avec l’humanisme de la Renaissance. En 1465, à l’initiative de l’archevêque d’Estergom d’origine croate, Jan Vitez de Sredna, fut fondée l’Academica Istropolitana (Istropolis était le nom grécisé de Bratislava), sur le modèle de l’université de la Sorbonne. Cette période vit également le développement de villes d’extraction minière (or à Kremnica, cuivre à Banska Bystrica, argent à Banska Stiavnica) et du commerce. Les Slovaques sont refoulés dans les monts métallifères et les meilleures terres de plaine sont colonisées par les Magyars. Plusieurs siècles après, la pression turque sur la grande plaine hongroise, permanente après la victoire turque de 1526, contraint l’aristocratie magyare à s’installer en Slovaquie et à transférer la capitale de Budapest à Pozony, nom hongrois de Bratislava (appellé dès le XIIIe siècle Presbourg par les marchands allemands, et Presporok par les Slovaques). Elle devient la ville de la Diète hongroise et la métropole religieuse de la Hongrie avec Trnava. 

Les armées hussites avaient pénétré en Slovaquie en 1428, mais c’est autour des années 1520, à travers d?abord la bourgeoisie allemande des villes hongroises restée en contact avec son pays d’origine, puis par des étudiants de Slovaquie qui fréquentaient les universités allemandes que se fit la diffusion des idées de la Réforme. Dans les régions habitées par les Slovaques, des prédicateurs encouragés par des seigneurs et des généraux de l’Empire magyar propagèrent la doctrine de Luther et les grandes villes slovaques devinrent rapidement des foyers du protestantisme. Si, au début, les Habsbourg prétendant au trône apportèrent leur appui au mouvement de la Réforme afin de se concilier la noblesse et la population des villes, ils soutinrent sans condition, dès la fin du XVIe siècle, une reconquête catholique souvent brutale, dans laquelle les jésuites représentaient l’élément central. La Slovaquie connut pendant des décennies de violents conflits religieux. 

La force de l’emprise hongroise 

A partir du XVIIIe siècle, quand la pression ottomane se desserra, l’emprise hongroise ne cessa de progresser en plaine, «magyarisant» les populations en place qui ne pouvaient compter sur aucun appui extérieur. Se met alors en place une structure agraire duale, opposant les immenses propriétés aristocratiques, agricoles ou de chasse aux microfundia paysans. Dans le même temps, la Slovaquie prend conscience de son particularisme culturel et linguistique, grâce à la création d’universités par les catholiques. En 1848, à l’occasion des graves difficultés que connaît l’Autriche à la nouvelle de la Révolution française, le nationalisme slovaque s’exprime ouvertement en réclamant vainement l’autonomie au sein de la Hongrie. Aussi, lorsque les Magyars font sécession, sous la direction de Kossuth, en 1848, les Slovaques se rangent-ils du côté de l’Autriche. En 1861, par un mémorandum adressé à la Diète, les Slovaques réclament que l’on reconnaisse l’existence de la nation slovaque et la délimitation d’une région slovaque de Haute-Hongrie où le slovaque serait la langue de l’enseignement et de l’administration. Le texte reconnaît le hongrois comme langue de la diplomatie et langue courante à l’intérieur du pays. En  1863, la principale association culturelle, la Matica, est fondée à Martin. Mais, avec le compromis austro-hongrois de 1867, à la suite duquel François-Joseph, empereur d’Autriche, est couronné roi de Hongrie (fondation de la double monarchie austro-hongroise), les Magyars dont l’autorité est restaurée tentent de réduire la minorité slovaque (10 % de la population hongroise), en lui imposant leur langue et leur culture et, en 1875, la Matica est fermée.

Vers l’union avec les Tchèques 

Les mouvements nationalistes slovaques se multiplient alors: ils ont pour objectif l’union avec les Tchèques, qui est réalisée après le démembrement de l’Autriche-Hongrie en novembre 1918. En 1939, l’action des autonomistes slovaques fournit à Hitler l’occasion d’intervenir pour la seconde fois en Tchécoslovaquie: il exige le droit à l’autodétermination pour les Slovaques. Une république slovaque est proclamée en mars 1939, après le démantèlement de la Tchécoslovaquie par Hitler. Sous la présidence de Mgr Tiso (octobre 1939), la République slovaque se place aussitôt sous la protection du Toisième Reich et met en œuvre la politique hitlérienne. Un Conseil national slovaque, qui rassemble plusieurs groupes de résistance — agrariens, indépendants, communistes et socialistes — est créé en décembre 1943 dans le but de préparer un soulèvement. Le Conseil négocie avec des représentants de l’armée slovaque son ralliement à l’opération. Le soulèvement qui éclate le 29 août 1944 à Banska Bystrica mobilise environ 60?000 soldats commandés successivement par les généraux Jan Golian et Rudolf Viest, et 18?000 partisans. L’insurrection est d?abord un succès, mais l’entrée des troupes allemandes en Slovaquie provoque l’échec des opérations militaires. La ville de Banska Bystrica est prise à la fin d’octobre 1944. La lutte des partisans se poursuit alors dans les montagnes jusqu’à l’arrivé des troupes soviétiques qui libèrent Kosice en janvier et Bratislava en avril 1945.

Après la Seconde Guerre mondiale, la Slovaquie retourne à la Tchécoslovaquie. Avant 1969, dans le cadre de l’État tchécoslovaque, la Slovaquie a bénéficié de certaines institutions propres, comme le Conseil national et le parti communiste slovaque. À la suite de l’échec du printemps de Prague et de l’occupation soviétique, une grande réforme constitutionnelle se met en place, faisant de la Slovaquie une nation à part entière au plan administratif et politique au sein d’une République tchécoslovaque fédérale.

La Slovaquie depuis 1989 

Cette république fédérale ne survivra pas à la «Révolution de velours» de 1989, qui vit la chute du régime communiste, le retour sur la scène politique d’Alexandre Dubcek (ancien dirigeant du printemps de Prague) et l’arrivée au pouvoir de l’écrivain Václav Havel (animateur du mouvement de défense des droits de l’homme de la Charte 77). Après six mois de négociation entre dirigeants (c’est-à-dire essentiellement entre les Premiers ministres tchèque et slovaque V. Klaus et V. Meciar) et sans consultation populaire (une grande partie de leurs concitoyens, semble-t-il, n’étaient pas favorables à la «partition»), la République fédérative tchèque et slovaque fait place, le 1er janvier 1993, à deux États distincts: la Slovaquie et la République tchèque. La République slovaque est devenue membre de l’ONU le 19 janvier 1993 et a été admise au Conseil de l’Europe le 30 juin de la même année. 

Premier président élu en 1993, Michel Kovac a désigné l’artisan de l’indépendance, Vladimir Meciar, à la direction du gouvernement, après la victoire du parti de ce dernier aux élections législatives organisées en septembre 1994. En mars 1998, V. Meciar a succédé au président Kovac à la tête de l’État et a cumulé cette fonction avec celle de Premier ministre. Cependant, sa politique autoritaire et anti-démocratique (notamment vis-à-vis des minorités hongroise et tsigane), rendue responsable par l’opposition et par l’opinion de la disqualification du pays dans le processus d’intégration à l’OTAN et à l’Union européenne (en 1997), a été sanctionnée par les électeurs qui ont largement cautionné la candidature du chrétien-démocrate, Mikulas Dzurinda. En 1999, si la restauration d’un État de droit et un retour à plus de démocratie semblent acquis, le Premier ministre et son gouvernement demeurent confrontés à une grave crise économique, illustrée notamment par une aggravation du chômage et un déficit du commerce extérieur persistant. Cependant, les améliorations notables apportées dans le domaine politique et l’élection, pour la première fois au suffrage universel direct, du président Rudolf Schuster en mai 1999, semblent jouer en faveur du dossier slovaque déposé auprès des instances de l’OTAN, de l’Union européenne et de l’OCDE. Cette dernière a d’ailleurs accepté l’adhésion de la République slovaque en septembre 2000.