L’ECONOMIE TCHEQUE

La République tchèque est caractérisée par une longue tradition industrieuse et industrielle. Son territoire était fortement industrialisé et urbanisé dès le XVIIe siècle. En 1914, la Bohême, la Moravie et la Silésie étaient considérées comme le centre économique de l’empire des Habsbourg, en lui assurant les deux tiers des équipements et de la production industrielle. Le déclin subi durant la période socialiste est dû à l’application d’un système de planification ultra-centralisé sur le modèle soviétique et à la subordination du système économique de la Tchécoslovaquie à celui de l’URSS. A partir de 1989, c’est à un véritable retour vers l’Europe de l’Ouest auquel on a assisté. Si l’économie était étatisée à 97 % et si le commerce se faisait à 65 % au sein du Conseil d’assistance économique mutuelle (CAEM) en 1989, dès 1993 on notait que 60 % des échanges se faisaient avec l’Union européenne et le secteur étatique n’assurait plus que 44 % du produit national. 

Jusqu’au début de 1997, la République tchèque a fait figure «d’enfant modèle» de la transition en Europe de l’Est avec la permanence de la stabilité de la monnaie depuis 1991, un déficit budgétaire quasi-nul (0,1 % du PNB en 1996) avec une inflation maintenue à 10 % et une croissance avoisinant les 4,4 %. La dévaluation de la couronne, le 26 mai 1997, a été perçue comme le premier coup de tonnerre dans un ciel serein, et a aussitôt provoqué un ébranlement de la coalition au pouvoir. 

L’année 1997 a marqué la fin des illusions concernant le «miracle» économique tchèque sans cesse exalté dans le discours aux accents ultra-libéraux de l’équipe de V. Klaus, au pouvoir depuis 1993. La réalité révèle une situation préoccupante : la croissance du PIB a représenté à peine 1 % en 1997 contre 3,9 % en 1996 et 6,4 % en 1995. Après avoir diminué de 1,7 % au premier semestre de 1998, le PIB pourrait connaître une baisse de 1 à 2 % pour l’ensemble de l’année, et la dette extérieure s’élevait, en 1997, à 21 milliards de dollars. De surcroît, au premier trimestre 1998, les investissements étrangers semblaient avoir quelque peu déserté la République tchèque. La politique de rigueur mise en place lors de la grande crise financière de 1997 a entraîné une diminution des salaires réels de 3,6 %, conduisant à une baisse de la consommation privée de 4,5 %. 

Le chômage croît vertigineusement : en un an, d’août 1997 à août 1998, le nombre de travailleurs sans emploi a augmenté de 45 % et le taux de chômage a atteint plus de 7 % à la fin de 1998. Pour la première fois, le chômage a aussi concerné de jeunes diplômés. 

Un développement inégal selon les régions Un dernier élément a joué en faveur d’une sortie du socialisme en République tchèque: la position géographique et l’immédiate proximité de la partie la plus riche de l’Europe occidentale (Allemagne). Ainsi, les investissements étrangers se concentrent au contact de la Bavière et délaissent les frontières polonaises et slovaques. La République tchèque se divise néanmoins en trois régions: le Nord industriel, le Sud plus agricole et forestier, et, entre les deux, la région centrale de Prague. Le Nord produit ainsi les quatre cinquièmes de la houille, la presque totalité du lignite, enfin les trois quarts de l’électricité thermique. Il concentre plus de 50 % de l’emploi industriel de la République. Dans ce Nord, on distingue deux pays noirs: le fossé de lignite de l’Oh e de Sokolov à Most et le bassin houiller silésien. Cette région, qui concentre 4 millions d’habitants, est caractérisée par une forte pollution. Le Sud se situe en-deçà d’une bande Cheb-Tachov à l’ouest et Opava-Ostrava à l’est et regroupe plus de 4 millions d’habitants. La vie rurale, agricole et forestière est particulièrement développée sur le long versant des monts de la umava et sur celui du bassin morave. Depuis 1990, cette région voit arriver les investissements étrangers pour des opérations touristiques. La Bohême du Sud constitue le poumon vert du pays surtout pour l’agglomération praguoise. La Moravie fait aussi partie du Sud et est caractérisée par des bassins agricoles (plaines, chênes, maïs, vigne) et une agriculture productive. Brno en est la ville principale, avec ses quelque 388.899 habitants. 

Agriculture

Le secteur de l’agriculture connaît depuis 1990 un déficit de 30 milliards de couronnes. Trois questions sont au centre des préoccupations du monde agricole : la sauvegarde du secteur coopératif, l’adaptation au régime des subventions, le coût de l’ajustement aux normes européennes. En 1997, les subventions aux filières bovine et laitière ont été de nouveau réduites. Selon la Chambre agraire, le cheptel bovin serait tombé au niveau de 1.825 têtes et serait inférieur de 50 % à celui détenu par des agricultures comparables des pays de l’Union européenne. Le déficit de fertilisation serait, depuis 1990, de 4 500 couronnes à l’hectare. 

En 1997, les inondations de l’été ont gravement endommagé les cultures. 

Industrie

En 1997, les principaux secteurs industriels traditionnels (charbonnage et pétrochimie, cuir et textile, mines) ont été gravement touchés par la stagnation générale de l’industrie liée au manque de compétitivité. En revanche, les bières tchèques ont connu une production record avec 18,8 millions d’hectolites. 

Dans l’industrie automobile, la restructuration a été achevée. A la fin de 1997, l’Etat ne possédait plus que 1,66 % de ce secteur, le capital étant désormais réparti entre des investisseurs étrangers (42 %), des fonds d’investissement (10 %) et d’autres actionnaires (35 %). 

Privatisation

Le processus de privatisation des entreprises s’est déroulé en trois phases. La première, en 1992-1993, s’est concrétisée par la vente de coupons aux citoyens représentant un capital de 650 milliards de couronnes. Après la seconde vague, en 1993, la part des coupons rachetés par une dizaine de fonds d’investissements, partiellement contrôlés par l’Etat, s’élevait à plus de 50 %. La troisième qui devait ouvrir au marché les grandes entreprises nationales s’est pour part effectuée au rabais (jusqu’à 40 % du prix), et pour une autre part a été gelée. Au total, 85 % des entreprises sont passées aux mains d’actionnaires privés et 70 % des coupons ont été échangés contre des parts des 400 fonds de privatisation et d’investissements créés pour gérer le processus. L’État avait cependant conservé une participation importante dans la sidérurgie, la chimie, les services publics, l’énergie et dans certains secteurs à caractère stratégique. 

Il faut noter que l’ensemble des opérations de privatisation a été entaché de pratiques délictueuses comme par exemple le scandale des aciéries Poldi, ou celui des aciéries de Vitkovice, mêlées au scandale du financement du parti de l’ancien ministre Dlouhy (l’ODS). Il est souvent extrêmement difficile de savoir exactement quel propriétaire se tient derrière les holdings et les sociétés écrans. La vente des actifs de sociétés et le transfert de fonds à l’étranger ont été pratiqués à une vaste échelle, comme ce fut le cas par exemple du Holding industriel Harvard, qui transféra ses fonds à Chypre et dans d’autres paradis fiscaux, ou plus récemment celui de la C S Fondy, qui détourna 1 milliard de couronnes vers l’étranger grâce à des complicités au sein du ministère des Finances. 

La situation des banques tchèques demeure précaire du fait de l’ampleur de créances douteuses, ce qui rend difficile leur vente au secteur privé. Le Premier ministre M. Zeman a affirmé vouloir poursuivre et achever leur privatisation avant l’an 2000 à un prix correct, il pourrait ainsi être amené à en assainir la situation et à les recapitaliser au préalable. Beaucoup espèrent de la privatisation des banques, outre un progrès radical pour résoudre la question des créances douteuses, la clarification des relations entre le monde de la finance et celui des entreprises. 

Echanges

En 1997, le République tchèque a réalisé plus de 50 % de ses exportations et de ses importations avec l’Union européenne, son principal partenaire restant l’Allemagne, et 25 % avec les pays en transition, essentiellement le «groupe de Visegrad» (Pologne et Hongrie) et la Russie. 

Elle cherche aujourd’hui à s’ouvrir à d’autres débouchés, et d’anciennes filiales des centrales du commerce extérieur (Molotov, Transakta) sont réhabilitées en Amérique du Nord (marché pour des produits mécaniques et des biens de consommation); au Proche et au Moyen-Orient l’industrie tchèque va proposer des équipements miniers, métallurgiques et de moyens de transport. En 1997, les exportations de machines et de matériels de transport ont augmenté de 51,4 %. On a enregistré, la même année, une baisse progressive des importations de biens manufacturés et de produits alimentaires au bénéfice de la production locale. 

Un accord conclu avec la Norvège en 1997 pour l’acheminement de pétrole par oléoduc via l’Allemagne devrait permettre de réduire la dépendance de la République tchèque vis-à-vis de la Russie en matière énergétique.